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04 Dec 2018

Extrait du chapitre De nouveau la face cachée de la lune in Et la lune est venue les prend

 

Eva (une vraie enfant du hip hop) brûlait de se faire tatouer et ce n'était pas une petite fleur à l'intérieur du bras, non, elle voulait se faire graver dans le dos un grand oiseau aux ailes déployées " qui suivra le mouvement de la respiration et qui, à l'inspiration, prendra un mouvement d'envol ", une belle image qu'elle avait vue dans un catalogue de dessins à tatouer. Cette reprise du thème de l'oiseau bleu cher à leur grand-père qui leur racontait ce conte avec gourmandise quand elles étaient petites, était manifestement une production du deuil. Elise aussi adorait l'oiseau bleu, le château bleu, la licorne bleue… Eva voulait un tatouage coloré, comme ces Japonais qui se couvraient le dos de fresques bigarrées mêlant des dragons à des nuages, des poignards à des cerisiers et dessinant toutes sortes d'arabesques, aucun pouce de peau ne restant libre d'inscriptions. Il ne fallait surtout pas en parler à Colette, la mère d'Eva, qui déclencherait illico une attaque d'apoplexie...

Photo credit: "https://visualhunt.com/author/69a668 

19 Nov 2018

Extrait de Et la lune ... : Chap 5 L'un avance, l'autre recule, jamais en même temps

La Sorbonne, cette grande dame, lui est devenue insupportable : les couloirs mi éclairés, les errances pour trouver les salles qui ne sont jamais les bonnes, les amphis bondés et surchauffés où l'on n'entend rien, les profs et les assistants médiocres, toujours à compléter par des manuels, l'absence d'encadrement, les étudiants laissés à eux-mêmes, le chacun pour soi.

Ce monde gouverné par un seul Dieu : EXAMEN, seule vérité de cet univers impitoyable. Ce mot, en torsion sur son X, Elise le craignait plus que tout. A partir de chaque mois de mars elle vivait comme les jeunes athéniens au temps de Thésée qui attendaient de savoir s'ils allaient être livrés au Minotaure : l'examen est le sacrifice humain des temps modernes, tous ces jeunes qui immolent leur jeunesse à faire entrer dans leurs neurones des montagnes de savoirs inutiles et qui seront jugés à l'aune d'un sujet minuscule choisi pour les éliminer sans merci.

L'oral, pour Elise, est ce qu'il y a de plus redoutable. Des bourreaux s'installent en face de toi pour te coincer, t'humilier et te ridiculiser, prêts à t'engloutir dans leurs mandibules acérées, à l'oral tu es nue. Ces pensées lui donnaient la colique, ses doigts se tordaient, elle devenait froide, elle aurait préféré presque la guillotine, au moins ce serait fini.

08 Nov 2018

Extrait du chapitre : Année solaire mouvementée de Et la lune est venue les prendre

 

Un incident fâcheux interrompit le cours tranquille de la barque de notre petit enquêteur de vie islamique. Fouad avait rendu visite à Abdoul, comme il le faisait de temps en temps, ne serait-ce que pour avoir des nouvelles de la cité Ravel (bagarres, guetteurs, filles, mariages forcés, violences quotidiennes…). Cette fois, Abdoul lui demanda, sans autre commentaire, de se rendre au cimetière de Bagneux, carré 98. Toujours méfiant et hésitant, il mit trois semaines à se résoudre à y aller. – non par obéissance mais par curiosité. Prudent, il mit un sweat à capuche. Mais il tomba mal, jamais il n'avait de chance avec les Bagnards. Quand il arriva, deux revendeurs de shit – qu'il connaissait- étaient en train de soulever un carreau du tombeau lorsque quatre policiers en civil embusqués derrière une chapelle funéraire se jetèrent sur eux, les ceinturèrent et leur mirent les menottes. Fouad, sans hésitation cette fois, enleva discrètement sa capuche et fit mine de passer son chemin.

 

03 Nov 2018

Extrait du chapitre : La réconciliation de Et la lune est venue les prendre

Il commanda des huîtres pour lui et les dégusta, fermant les yeux et aspirant les petites formes infâmes avec un doux sifflement. Décidément, il est bon vivant, se dit-elle en savourant un foie de veau bien cuit aux câpres.

Elle baissa les yeux, scrutant les mains de son père – nerveuses, déjà marquées de taches - et sa voix – qu'elle aimait -, elle était excitée, elle aurait voulu qu'il dise qu'avec la fameuse Mathilde, c'était fini et qu'il allait revenir auprès de Virginie.

Surtout, elle brûlait d'envie de lui parler du Rasta ; elle été allée le voir, un pauvre type, comme elle lui était reconnaissante de l'avoir tirée de ses griffes et de l'avoir adoptée…

Juste à ce moment, le pianiste du bar se mit à jouer l'air de "L'amour est enfant de bohème." Là, se mêlant à l'allégresse de la musique, une bouffée d'affection la prit à la gorge : elle l'aimait et c'était pour toujours, elle lui prit la main, il la pressa longuement. C'était l'homme de sa vie.

30 Oct 2018

Enfin tout de même ! Extrait du récit : Cœur en éclats

Haletante, pressée maintenant, elle se dirige vers sa voiture, une vieille deux-chevaux brinquebalante où elle entasse les affaires et les bambins.

La voiture veut bien démarrer, crachote et franchit la barrière de la propriété. Agathe ne tient pas à croiser son général de père.

Elle arrête le véhicule à quelques kilomètres, près d'un champ. Tout de suite, les enfants s'égaillent sur le pré, gazouillent, crient à qui mieux mieux, ramassent des fleurs, se courent après. Emile, le grand frère, veille, mine de rien.

Agathe reste à sa place, enfoncée dans le siège du chauffeur, dévastée.

15 Oct 2018

Le château bleu Extrait de : "Enfin tout de même"

C'était l'automne. Le jour déclinait mais la lumière était belle, plus bleue que celle du petit matin. Il sortit. Comme on aime caresser son chien ou s'attarder sur de vieilles photos, lui se plaisait à contempler son château et à faire danser son imagination autour de son plus vieil amour ! Le Baron Perché avait choisi de vivre dans les arbres, au-dessus de son château fort. Lui, non, il se contentait de faire une marche quotidienne autour de l'édifice, de préférence à l'heure où le soleil embrase les arcatures ajourées des fenêtres du haut. Il commençait en se plaçant sous les grands marronniers de l'Ouest. De ce côté, il admirait la construction centenaire déployer sa surface de pierres dorées et son toit d'ardoises presque vertical.

08 Oct 2018

Trous dans le mur de Berlin dans " Enfin tout de même! "

A la fin du printemps 75, un jour ensoleillé de mai, près de deux ans après l’implantation réussie de la représentation française en RDA, l’ambassadeur est interrompu dans la signature de ses parapheurs par l’huissier qui lui fait part, tout bas de la demande de l’ambassadeur du Sénégal d’être reçu en urgence. Immédiatement introduit dans le bureau de M. de Certeuil, son Excellence M. Ndiaye met un doigt sur sa bouche et le pointe vers la cage dite « de Faraday », une sorte de kiosque, en verre épais, sur pilotis acoustique, installé dans toutes les ambassades occidentales à Berlin-Est pour soustraire les entretiens confidentiels aux écoutes de la Stasi. M. de Certeuil s’y enferme avec son visiteur, tellement pressé qu’il manque de s’assommer en entrant dans cette petite verrière.
- Cher collègue, je vous apporte une information que mon chauffeur vient de me donner : votre chauffeur à vous, M. Hamidou Diouf, transporte dans le coffre de votre voiture de fonction des Allemands de l’Est vers Berlin-Ouest. 
Long silence effaré. M. de Certeuil se lève précipitamment. Il fait appeler Hamidou qui revient à l’instant de ses courses à l’Ouest. Dans la cage, après s’être, lui aussi, cogné la tête, celui-ci reconnait immédiatement son acte, aussi simplement que s’il avait parlé de la composition de son petit déjeuner. Il reste évasif sur le nombre de personnes à qui il a fait traverser Checkpoint Charlie en contrebande....

01 Oct 2018

ET LA LUNE EST VENUE LES PRENDRE EXTRAIT Chapitre 2

Cette fille, en moins de deux mois avait bouleversé sa vie. Dès qu'il l'avait aperçue, derrière le bar du café solidaire de Montrouge, il avait été aimanté. Tout de suite, il avait été pris du désir de connaître cette grande métisse aux yeux de biche, qui parlait avec un drôle d'accent, en zézayant un peu. Elle n'était pas comme les autres filles, elle ne lui faisait pas peur, elle était un peu dans les nuages, drôle de nana. Elle venait de s'installer à Montrouge, elle l'avait un peu refroidi en parlant du gang des barbares à Bagneux, mais, en fait, elle était douce, elle avait sur la tête comme une petite corbeille, formée par ses cheveux frisés rejoints sur le crâne et tout de suite il avait imaginé qu'un oiseau pourrait y faire son nid. Le lendemain, ils s'étaient retrouvés au café et le soir il l'avait raccompagnée chez elle, mais elle n'avait pas voulu qu'il reste. Il avait préféré cela, il n'était pas du genre à s'incruster, il avançait dans la vie à petits pas comme un jeune chien qui renifle et s'arrête contre les poteaux pour lever la patte. ;. Après, tard dans la nuit, il était parti consulter Kalidja, la voyante dans sa remorque de Denfert Rochereau. Qui lui avait dit que, oui, elle voyait Elise comme la femme de sa vie.
Elise réclamait sa présence en permanence. Mais dès qu'ils étaient tout proches l'un de l'autre, elle avait très peur et très froid. Elle était vraiment zarbi, cette nana, avec un nom chelou en plus, un "de" …. Mais il avait été capable de supporter ses étrangetés, elles l'arrangeaient, il avait trop de mal, lui-même à quitter son imaginaire et à débarquer sur la planète terre ; alors atterrir auprès d'une extraterrestre qui avait une peur terrible du sexe….

 

29 Sep 2018

Séance de dédicaces à la médiathèque de Montrouge

Plusieurs d'entre vous sont venus me voir samedi à la médiathèque de Montrouge. Nous avons pu parler de trous dans le mur de Berlin (à partir d'une histoire vraie) de mon premier roman "Enfin tout de même"  et des jeunes qui sont tentés par le djihad. Merci. J'ai adoré.

16 Sep 2018

EXTRAIT de "Et la lune est venue les prendre" - DESCENTE VERS LE SUD

 

Ils partirent dans la vieille Clio que Virginie avait mis à leur disposition pour le voyage. Ce fut pour Fouad sa première grande sortie hors de la région parisienne. Il avait du monde extérieur une représentation modelée par la télévision, le cinéma et les jeux vidéo : une cohorte d'images colorées – routes, édifices, forêts, fleurs, mers, planètes -, où des êtres, parfois humains, parfois robots, parfois animaux, parfois monstres évoluent, porteurs d'incroyables aventures. Mais cette fois-ci, miracle, son corps était engagé, c'est lui, tout entier, qui traversait les paysages de la France : c'était du réel, pas du jeu, il était inclus, en chair et en os, Elise à ses côtés.

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